Travaux sans permis et conformité de la vente
Voilà une nouvelle décision qui vient alimenter le contentieux abondant entourant la notion de « délivrance conforme » au sens des articles 1604 et suivants du Code civil, dans le domaine de la vente d’immeuble.
Il s’agissait, en l’espèce, de la vente de lots de copropriété, l’acte authentique ayant été signé le 16 mai 2013.
Les acquéreurs ayant découvert, après la vente, que des travaux avaient été réalisés sans permis de construire préalable, ont assigné les vendeurs en réparation de leurs préjudices sur le fondement de l’obligation de délivrance.
La Cour d’appel (Paris, 18 novembre 2022) a rejeté leurs prétentions au motif que :
- s’il est constant que les transformations subies par le bien depuis sa construction n’ont pas été régularisées par l’obtention d’un permis de construire, il n’incombait pas au vendeur au titre de l’obligation de délivrance conforme de délivrer un bien disposant d’un permis de construire pour des travaux réalisés avant son acquisition, l’acte de vente ne faisant aucune mention de ce que les transformations subies auraient été autorisées par un permis de construire ;
- l’absence de livraison d’un bien disposant de toutes les autorisations d’urbanisme et conforme à la règlementation en vigueur ne relève pas d’un défaut de délivrance conforme mais de la garantie des vices cachés, dès lors qu’aucune stipulation de l’acte de vente ne mentionne la délivrance d’un permis de construire en bonne et due forme pour les transformations opérées sur l’immeuble, ni la conformité du bien aux normes d’accessibilité et aux normes thermiques, les appelants n’établissant pas en outre un risque d’avoir à remettre le bien dans son état antérieur.
La Cour de cassation casse et annule l’arrêt d’appel au visa de l’article 1604 du Code civil précité :
En statuant ainsi, par des motifs impropres à exclure le manquement des vendeurs à leur obligation de délivrance conforme, la cour d’appel a violé le texte susvisé.
Ainsi, selon la Haute cour, l’obligation de délivrance conforme est susceptible de concerner la conformité du bien objet de la vente aux règles d’urbanisme, quand bien-même la promesse, puis l’acte de vente ne comportent aucune clause relative à la conformité des travaux, et que ces travaux aient été réalisés non par le vendeur, mais un précédent propriétaire.
Cet arrêt rappelle l’importance d’informer l’acquéreur, dès la signature de l’avant-contrat, de toute irrégularité pouvant affecter l’immeuble, notamment eu égard aux prescriptions d’urbanisme, sauf à pouvoir la purger en amont, et même si elle n’est pas le fait de l’actuel vendeur…
Rappelons, par ailleurs, que, par une analyse assez subtile, l’inconstructibilité d’un terrain, vendu "à bâtir", relève, non de l’obligation de délivrance conforme, mais de la garantie des vices cachés (C. civ. art. 1641 et s.).
Article en son intégralité: fnaim.fr
Ressources associées
Cour de cassation 3è ch. civ., 11 septembre 2025, pourvoi n° 23-17.751